Festival de Cannes 2005 : avec Manderlay, la seconde partie d'une trilogie américaine après Dogville, Lars Von Trier dénonce l'esclavage et l'héritage américain

Publié le par LA PLUPart DU TEMPS

Avec Manderlay, Lars Von Trier aborde le thème de l'esclavage et poursuit sa réflexion virulente sur l'histoire des Etats-Unis, et plus généralement sur les ressorts les plus sombres de l'âme humaine. Après Dogville, présenté en 2003, Manderlay constitue le deuxième acte de la trilogie américaine de l'auteur danois, couronné de la Palme d'or en 2000 pour Dancer in the dark.

Grace, incarnée cette fois par Bryce Dallas Howard - après le renoncement de Nicole Kidman à poursuivre - et son père (Willem Dafoe), chef de gang élégant, laissent Dogville derrière eux. Alors qu'ils sont en Alabama et qu'ils s'apprêtent à repartir, une jeune femme noire vient frapper à la fenêtre de leur voiture et sollicite l'aide de Grace. Derrière un lourd portail de fer forgé, elle découvre un homme qui s'apprête à recevoir le fouet et une communauté de noirs vivant comme avant l'abolition de l'esclavage, alors que l'histoire se déroule en 1933. Grace, révoltée, va tenter de libérer ces hommes de leurs chaînes alors que la propriétaire de la plantation, Mam (Lauren Bacall), vient de mourir. Mais elle se heurtera à de nombreux obstacles, soulevant des questions morales sur la nature de la démocratie, de la justice et de leurs dérives.

Comme dans Dogville, Manderlay se déroule sur une scène de théâtre, dans un décor dépouillé, en 8 actes, comme pour donner encore plus de poids et de force aux dialogues et aux questions fondamentales qu'aborde Von Trier. "Si j'ai choisi de me pencher sur les Etats-Unis dans cette trilogie, c'est que je suis à 60% américain, même si je n'y ai jamais mis les pieds, dans la mesure où mon pays et ma vie sont influencés par la main-mise américaine", a expliqué le réalisateur, lors d'une conférence de presse lundi à Cannes.

"L'Amérique domine le monde, nous sommes sous sa mauvaise influence, et M. Bush est un connard qui fait des trucs complètement stupides. (...) Je ne peux rien changer, je ne vote pas aux Etats-Unis, je peux juste faire des films pour dénoncer. (...) Ce qui tue le débat, c'est le politiquement correct, où chacun finit par être d'accord. Moi j'ai choisi de ne pas être d'accord", a expliqué Lars Von Trier.

L'acteur américain engagé Danny Glover, qui campe un vieux sage, malgré les "réserves" qu'il a d'abord posées à la première lecture du scénario, estime que le film "pose des questions essentielles", car estime-t-il, "l'idée globale de la démocratie (aux Etats-Unis) s'est construite sur le dos des esclaves. Il y a eu très peu de changements aux Etats-Unis depuis 1864 et l'abolition de l'esclavage. Le film se passe en 1933 à une époque où l'industrie du Sud a fleuri grâce aux travailleurs forcés, anciens esclaves".

Pour le comédien français d'origine africaine Isaac de Bankolé, qui incarne le rebelle Timothy, "il est facile de parler du problème de l'esclavage aux Etats-Unis. Mais je voudrais aussi voir l'Europe et la France maintenant s'y attaquer" conclut-il.

Publié dans BREVES

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